Deuxième Témoignage de Glenn, dans le cadre du parcours de certification
Département de la Gironde.
Dans le cadre du témoignage sur mon parcours de certification, il me semble pertinent de mettre en parallèle mon premier témoignage réalisé en 2021 avec ma pratique actuelle pour voir ce qui a pu évoluer.
J’ai donc intégré l’école maternelle de Saint Germain du Puch en Gironde à la rentrée 2021-2022, école que ne j’ai pas choisie par hasard car je savais que mes deux autres collègues y travaillaient en pédagogie Montessori depuis 2015, dont Bérengère Lahon-Grimaud, qui fut jusqu’en 2023, délégué départementale de la Gironde.
Cette mutation et cette nouvelle équipe, fédérée autour d’une pratique de la pédagogie Montessori en lien avec les valeurs et les attendus de l’école publique ont radicalement transformé l’enseignant que j’étais !
Est-ce que tu suis les élèves sur plusieurs années ?
Ce fut le premier vrai changement ! Une classe PS-MS-GS assurée, projet porté par une équipe enseignante qui revendiquait cette approche du triple niveau et soutenue par son inspecteur. Une école de 3 classes maternelle avec 3 triples niveaux.
(NB : Jusqu’ici, les effectifs de chaque année nous ont permis de proposer des triples niveaux. Une quatrième collègue est arrivée sur l’école en 2022-2023 et a fait le choix de n’avoir qu’un double niveau PS-MS ce que nous avons respecté. Cette année, elle a franchi le pas de la pédagogie Montessori avec nous et a, elle aussi, son triple niveau !)
Ma première année dans cette école fut donc une nouvelle « année zéro » car les élèves que j’ai eu n’avaient jamais pratiqué la pédagogie Montessori.
(NB : J’ai gardé pour ma première année les élèves de la collègue que j’ai remplacé lors
de ma mutation, et elle ne pratiquait pas la pédagogie Montessori.)
Cette année a donc été l’occasion de me familiariser avec des petites sections, que je n’avais jamais eues jusqu’ici. L’intérêt du triple niveau a pris tout son sens car au terme d’une année, j’avais 6 futurs MS qui, avaient reçu des leçons de grâce et courtoisie, de savoir-être/vivre, connaissaient suffisamment d’activités pour être autonomes lors de leur future rentrée.
Au terme d’une simple année, j’ai eu l’impression de gagner presque 6 mois sur l’avancée de mes présentations et mon ambiance de classe !
Au terme de 3 ans, j’avais donc un groupe classe, qui, dans sa grande majorité, avait toujours travaillé avec cette méthode. Et cela change complètement une ambiance de classe et ses attitudes de travail !
Je fais maintenant des rentrées très détendues, avec ⅔ de mon effectif quiconnait déjà la classe, est autonome, ce qui nous laisse le temps pour mon ATSEM et moi-même de bien s’occuper des PS. Par ailleurs ces derniers sont eux même rassurés de faire leur rentrée dans une classe où les autres élèves semblent heureux et au travail. L’ambiance est vraiment différente d’une classe simple niveau où tout est à refaire en somme chaque année !
Ta formation ?
Ce qui m’a permis d’évoluer encore, c’est ce changement d’école et l’arrivée dans une équipe fédérée autour de cette pédagogie.
Mes collègues m’ont aidé dans mon aménagement de classe plus grande, un luxe ! [NB : Je ne peux m’empêcher à ce sujet de faire un apparté car ma dernière formatrice, Juliette Danjon, n’a cessé de me répéter que ce n’était pas un luxe mais que ce devrait plutôt être la norme !], et ont partagé nombre de leurs ressources ( pédagogiques, organisationnelles ) dans un esprit d’équipe très soudée.
Evidemment, les nombreuses discussions, réunions d’équipe, ont participé à cet enrichissement, un peu à la manière des rencontres de GD mais cette fois de façon quotidienne ! Et bien sûr ce qui nous intéresse pour ce témoignage, ma deuxième formation auprès de Juliette Danjon-Vallon (NB : organisme Formation Montessori Rhône Alpes. Cette formation m’avait été recommandée par ma directrice qui l’avait elle-même suivie et en était ravie).
La formation s’est déroulée sur une année, à raison de 5 sessions d’une semaine avec un examen final (sans pression !), composé d’un écrit sur une thématique de notre choix et d’épreuves pratiques de présentations d’activités suivi d’une discussion. Elle peut proposer les sujets elle-même ou les déterminer avec les participants si il ne sentent pas à l’aise. Juliette demande aussi la rédaction d’albums, mais sans contraintes, de temps pour le rendu, ainsi que de forme, ceux-ci pouvant prendre la forme qui semble la plus pertinente pour chacun.
Je n’ai pas réalisé la première semaine car étant donné ma première formation, Juliette a estimé que ce serait peut être redondant et pas forcément nécessaire (mais avec le recul je dois dire que j’aurais bien aimé la faire !). Nous avons abordé la vie pratique, les aires du sensoriel, du langage, des mathématiques, la botanique, la zoologie, les expériences scientifiques. Dans le cadre de la formation, des modules supplémentaires ont été assurés par d’autres formatrices en géographie, anatomie, musique et arts plastiques. Soit une formation ultra complète, à ma connaissance, il n’y a pas d’autres organismes qui en propose autant !
Juliette a été une formatrice exceptionnelle, de par la qualité de ses transmissions, sa disponibilité, ses réponses à toute question, son soutien sans faille, son organisation (NB : La formation est organisée de manière spiralaire. Nous avons pu filmer toutes les présentations et elle a regroupé sur un cloud en ligne toutes ces vidéos, ainsi que tous les documents qu’elle a créés et qu’elle aborde au cours de sa formation).
Bien qu’étant déjà formé une première fois, j’y ai trouvé un nombre incalculable de « trucs » en plus : – dans l’accroche des élèves et l’introduction à un nouveau matériel – dans la manière de présenter parfois différente mais ô combien pertinente – dans la manière de re-découvrir / re-donner de l’intérêt à un matériel par des activités complémentaires qui font sens – dans l’ouverture parfois à des activités qui ne sont pas strictement Montessoriennes mais extrêmement complémentaires, voir qui paraissent nécessaires !
Cette deuxième formation m’a apporté encore plus que ce que j’en espérais ! Elle m’a permis de rentrer dans les détails de choses que je maitrisais parfois déjà mais dont je n’avais pas capté toute la subtilité, de repenser l’utilisation de certains matériels sous un autre angle, d’avoir une vision plus claire d’une progression dans les différentes aires.
As-tu tout le matériel et comment te l’es-tu procuré ?
Comme je l’ai expliqué dans mon dernier témoignage, j’ai fait le choix d’acheter le matériel personnellement pour pouvoir, si je souhaite changer d’école, tout emmener avec moi et réinstaller une ambiance complète sans être tributaire d’un budget classe, qui ne permet pas d’acquérir le matériel sur une seule année. Il en va de même pour le mobilier que je remplace petit à petit par, des étagères d’un unique modèle qui me convient car il est modulable à souhait, ajouré pour laisser passer la lumière et de taille convenable pour accueillir le matériel et, des ensemble table+chaise d’une surface et d’une taille selon moi plus conforme aux enfants que les bureaux que l’on trouve dans nos classes (Point Tupperware : ce sont les étagères IVAR et les chaises/tables SUNDVIK de chez Ikea®).
Ma classe est maintenant plutôt bien équipée pour répondre à la demande d’enfants de 3 à 6 ans. Certains matériels plus poussés me manquent encore dans certaines aires :
- Mathématique : meuble avec chaines des carrés et des cubes, tables de mémorisation multiplication et division, hiérarchie, grand boulier, grande division, fractions) –
- Sensorielle : clochettes et matériels associés
- Culture : cabinet de botanique
Malgré tout, je me pose la question de la pertinence de l’achat (onéreux!) de certains de ces matériels car ils se trouvent parfois loin dans la progression et on ne les atteint que rarement avec certains élèves… En ce qui concerne les clochettes, elles me font vraiment de l’oeil, qui plus est en
tant que musicien ! Cependant, c’est un matériel pour lequel on ne peut pas rabaisser ses attentes, côté qualité et donc tarif… Si on ne maitrise pas bien ses présentations et qu’on ne suscite pas l’envie chez les enfants en en jouant tous les jours, cela me semble un investissement fou et vain !
Il me semble en revanche pertinent de parfois renouveler des matériels usés mais beaucoup plus utilisés par les enfants. La bourse offerte pour l’achat de matériel dans le cadre du parcours de certification me permettra peut-être d’en acquérir en partie !
Tes résultats ou observations concernant la réduction des inégalités sociales, l’intégration de publics spécifiques…
Je ne suis plus en REP dans cette nouvelle école. Si les inégalités sociales
sont bien moins creusées, j’accueille tout de même, comme tout enseignant, quelques élèves dont la situation sociale peut paraitre plus défavorisée.
Difficile pour moi de parler de véritables résultats… Il faudrait pour cela une étude sociologique sur un parcours d’élève d’au moins 3 ans avec des évaluations régulières, pouvoir mesurer qualitativement les progrès qui relèvent des apprentissages en classe ou/et de soins extérieurs, de changements dans la cellule familiale…
En revanche, en suivant certains élèves sur une, deux ou trois années, je fais les observations suivantes :
- des élèves qualifiés de turbulents, qui bougent beaucoup lors de leur arrivée à l’école, qui n’ont pas les codes, se posent petit à petit grâce au cadre bienveillant. Je peux voir des élèves cesser de courir et se déplacer en marchant, en faisant attention au mobilier, à leurs camarades, en les observant de manière à ne pas les déranger, faire
attention au matériel qu’ils transportent, se concentrer profondément pendant de longues minutes sur leurs activités. - des élèves qui ne pouvaient rester assis en regroupement, se joignent
petit à petit à nous, pour partager des discussions, des histoires, des chants-comptines, des jeux, des rires ! – des élèves avec un faible niveau de langue à leur rentrée, acquièrent un vocabulaire et une syntaxe plus riche dans le cadre des activités de la classe et arrivent ainsi à une maitrise qui leur permet, tout au moins, d’évoluer sans soucis dans l’ambiance. – des élèves très timides se révèlent, en grandissant, dans l’aspect social du travail, en trouvant des partenaires privilégiés pour leurs activités. J’ai assisté à des plages de travail extrêmement riches et longues chez certains duos d’élèves, qui me questionnaient encore un an plus tôt par
leur force d’inertie ! - des élèves en situation de handicap ( diagnostics avérés de TDAH, Dyspraxie, TSA) sont contents de venir à l’école, se sentent en sécurité dans la classe, peuvent évoluer à leur rythme
Je vais me répéter, mais je n’ai toujours pas la prétention de dire que ma pédagogie réduit les inégalités sociales ou permet de mieux intégrer des publics spécifiques. En revanche, je trouve toujours intéressant de pouvoir offrir une méthode aussi riche et qui semble plébiscitée par les classes sociales supérieures, à des enfants d’une école publique.
Public Montessori ?
Si je suis toujours émerveillé par ce que je vois au quotidien dans ma classe, c’est car j’ai trouvé une méthode travail qui me convient mais qui correspond aussi grandement à la personne que je suis ! Et cela n’aurait pas été possible sans Public Montessori, alors encore un grand merci à toutes les personnes qui s’impliquent de près ou de loin dans cette aventure !
J’ai quitté mes fonctions de coordinateur au Pôle territoires en ce début d’année mais j’ai trouvé depuis deux ans une nouvelle fonction de codélégué départemental pour la Gironde, qui semble plus me combler.
Je remercie Sophie Charrier et Ophélie Dalbon de m’avoir motivé pour m’engager dans ce parcours de certification. Cette année de formation a été une parenthèse magique et il aurait eu une autre saveur sans vous ! Je
vous remercie également d’être venus me chercher pour relancer ce groupe départemental qui, comme beaucoup d’autres, ont pris du plomb dans l’aile lors de la crise du COVID… C’est une nouvelle expérience.
Après avoir tant reçu (et c’est peu dire !), je partage à mon tour avec joie et je suis très reconnaissant envers toutes les personnes qui nous accordent leur temps et leur confiance.
Un dernier mot pour Juliette Danjon-Vallon, mon incroyable formatrice. Je n’aurais passez de qualificatifs pour te décrire alors j’emploierai une formule plus laconique : Merci d’être celle que tu es !
Longue vie à Public Montessori!